Djamal Talbi

Inspiré par les couleurs des montagnes de la Kabylie, voisins, famille et amis ....
Créant des paysages abstraits avec seulement des figures suggérées

Djamel Talbi, artiste peintre Algerien, Algerie Elwani.
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Ma peinture en quelques mots …
Tout comme certaines musiques ou
certaines œuvres littéraires sont des
tableaux qui vous bousculent, vous
bouleversent ou vous transportent,
certaines toiles sont structurées tels
des récits à suivre ou à déconstruire,
manne picturale qui nourrit votre
regard, l'affine et l'aiguise pour lui
ouvrir des champs infinis à explorer.
C'est dans cette forme d'art total que
je suis tombé au berceau, cette
danse frôlant la transe, ce voyage
plein, soudain et instantané. Je suis né au milieu d'un trésor de couleurs et de formes, un
lieu de valeur et de valeurs, un authentique trésor. J'ai vu le jour dans une maison berbère
plus que centenaire au cœur des montagnes les plus isolées de Kabylie, où les troupes
françaises n'entreront qu'en 1857 alors que l'Algérie est déjà entièrement conquise du
littoral jusqu'aux confins du Sahara.
1976. Ne vous fiez pas à mon année de naissance.
Sidi Idir : presque une autre planète, une autre dimension...
J'ai ouvert les yeux loin de toute maternité, de tout confort matériel : ni eau ni électricité pas
plus que de routes praticables... Une fenêtre précieuse sur un monde ancien au temps
suspendu. Quelle chance, quel bonheur avec le recul. Ce cadre protecteur a gravé en moi
les premières formes et gammes de mon existence, repère inaltérable et pierre angulaire
solide pour mon regard ébloui, éduqué, sans cesse plus curieux de ces niches et multiples
jarres plongées dans l'obscurité rassurante, jamais rassasié face à ces massives portes de
dentelle, ces poutres, nos murs de pierre claire ou nos sommets gorgés de lumières. Les
tuiles ondulées me fascinaient, produites artisanalement avec l'argile rouge de nos jeux
d'enfants. Tout était utile, beau et simple à la fois. un tour de force autant qu'une nécessité.
La petite meule de ma mère était aussi belle que magique à mes yeux, elle servait
quotidiennement à moudre le blé en farine, tamisée, transformée en pâte, levée et enfin
cuite en pain. Elle opérait cette transformation de la survie. La faim et l'odeur du pain
chaud, celle de l'huile d'olive et des animaux tous proches, jouxtant nos habitations. Ce
monde vit en moi surgissant jusque dans mes préoccupations immédiates.
Les formes de cet univers
étaient d'emblée associées à la
vie, à son âpreté, à ses arêtes
tranchantes autant qu'à ses
bonheurs profonds. Le nez hors
de nos murs azur et blancs, en
quittant nos plafonds de bois,
noirs de suie, aussi noirs qu'une
nuit d'encre, je découvrais nos
inamovibles montagnes, aussi
familières qu'insaisissables,
changeantes au gré de nos
quatre saisons marquées,
pleines. A chacune de ces
quatre reines son rythme, ses
nuances et dégradations de couleurs, ses activités, ses formes et rituels, son alimentation.
Ni téléviseur ni téléphone, à chaque saison sa perfection et son ivresse colorée. Les gris
blancs de l'hiver, le blanc manteau royal de la neige et des glaciers, l'ocre aride de l'été et
ses verts puissants tachetant le paysage, les verts jaunes presque transparents du
printemps, fluides, bouillonnants, accompagné des mille couleurs vives de sa moisson de
fleurs sauvages. L'automne miraculeux aux verts se dégradant chaque jour, chaque heure
et nous offrant ses fruits rois, figues, grenades, raisins, concours de saveurs et de rondeurs
violacées ou mielleuses : croquantes et onctueuses leçons de l'automne au ciel parcouru
de mousses grises et blanches battues par des vents impétueux.
Dans mes montagnes, chaque trajet inaugure un chemin, ouvre sur une expérience
singulière et inédite, chaque raccourci pentu est une découverte, un changement de point
de vue permanent que ni bosses ni éraflures ne m'ont découragé de chercher. Mes
montagnes, quelle prétention. La nature dans toute sa puissance et sa pleine mesure, un
monde si vaste et parfait que l'on s'y sent, que l'on s'y sait lucidement, privilégié autant que
toléré.
Le vieux village, pluri centenaire, labyrinthe de masures basses et resserrées, humbles,
vivantes par tant de visages et de récits qui m'habitent. Chaque pas que j'y ai fait, chaque
foulée l'a inscrit un peu plus dans mon âme, gravé dans mon intériorité, imprégnant mes
sens et sculptant le moindre détail dans ma mémoire et ma besace créatrice. Chaque pied
nu posé dans la terre battue et la poussière a inversé la nature des choses, je marche en
moi-même en ces lieux et ils vivent intensément en moi sans jamais être figés. Aussi
lorsque je veux exprimer une émotion quelle qu'elle soit, une valeur universelle quelle
qu'elle fut, je n'ai qu'à convoquer les formes et les génies qui peuplent mes lieux.
D'authentiques souvenirs, chaleureux ou terribles, je puise formes et énergie, surgissant,
encore vibrantes, de ces allées sinueuses ou des versants aux arbres improbables et
noueux, défiant la gravité, de tous ces symboles berbères épurés, portés par les femmes en
tatouages ou bijoux, gravés sur les portes de bois mille fois repeintes et dénudées par le
temps et les conditions extrêmes, offrant une épaisseur de matière apparente ça et là,
autant de fenêtres sur le mystère et le passé si prégnant. Les objets anciens, les outils
agraires, le rouge marron du poêle à bois en fonte
et la gamme agitée et vacillante du feu, les nuages
au langage mystérieux, le blanc immaculé des
torrents, des filets de brume et des glaciers
imperturbables. Un monde dense et vaste, à
l'horizon changeant, aux teintes évoluant avec
l'exposition lumineuse et au gré des saisons.
C'était une vie très rude mais riche, tissée de liens
forts, de regards profonds, de silences pleins et de
paroles pesées, mémorables. La vie s'écoulait,
palpable, intense. Pourtant tout cela, jusqu'aux
gestes archaïques de nos mains calleuses nous
paraissaient aller de soi, comme si le monde entier
vivait à notre manière. Nos gestes étaient ceux du
berger qui prend soin de ses bêtes et ceux du
paysan qui prend soin de sa terre dans ses
oliveraies, dans ses champs et ses vergers, sur
son potager tout proche, les gestes du puisatier
expert en rigoles et canaux, ceux du brodeur et du
tisserand, ceux du génie humain coupé du monde
et devant s'assumer...
Assemblés autour du poêle unique, sans
seulement une radio à notre disposition, toutes les
générations se réunissaient bruyamment, inoubliables soirées de transmission et de vie
brute ponctuée par le conte tant attendu, lourd de sens et ouvrant les frontières de
l'imaginaire. Une nourriture en soi. Ce lien subtil et si évident, cette solidarité, ces visages
burinés par le froid intense et la canicule, par le vent et la pluie, ses visages encadrés par
de longues barbes blanches et coiffés de fleurs de tissus orangées, blanches ou
multicolores, ce sont ces visages qui me sourient à l'infini du sourire du sage, du fou avisé
et me considèrent encore de leurs regards tout à la fois perçants et indulgents.
Nos anciens nous ont élevés, je n'ai pas été éduqué par mes seuls parents. Le village
entier nous a élevés entre conseils et liberté, car la montagne est un terrain de jeu
incomparable. Jamais nos anciens, nos anciennes, ne nous ont déçu. Eux qui avaient
connu guerres, famines et épidémies incarnaient la patience et la rectitude. Ils ont traversé
tout cela sans perdre leurs valeurs et nous ont transmis une confiance sereine en la Vie, un
espoir indéfinissable en dépit des vicissitudes du quotidien et des drames tournoyants
autour de nos existences. Le mystère de la Vie l'emportait au travers des Noms Divins que
nous entendions psalmodier et que nous voyions mettre en oeuvre chaque jour :
la Miséricorde, le Vivant, le Subtil, le Bienveillant, la Paix.
Je suis né dans une maison où mon grand-père avant moi était né, imprégnée depuis
toujours par la vibration du dhikr: la répétition, l'invocation des Noms Divins, en silence ou à
voix haute, seul ou à l'unisson,
les chapelets s'égrainaient et les
caractères se modelaient,
s'apaisaient, se polissaient.
Les chants spirituels enivrants,
la danse sacrée et les vêtements
blancs des réunions spirituelles,
éclatants au soleil, m'ont
accompagné et imprégné depuis
que mes sens ont fait irruption
en ce monde. Le soufisme,
coulait en abondance, pur et
opérant, la spiritualité derrière
chaque pierre, chaque arbre et chez tous nos anciens.
Nos vieux étaient sages et nous les considérions avec vénération malgré notre fougue, nos
rêves d'ailleurs, de cet au-delà des monts crénelés qui nous parvenait par toutes petites
touches subversives et irrésistibles, cet ailleurs que nous fantasmions au point d'étouffer et
de négliger notre trésor, de ne plus parvenir à voir ce qui nous entourait.
Ce monde n'est plus, il a évolué, occulté et renouvelé.
Les anciens peuvent se compter sur les doigts de la main, internet et le béton ont
goudronné nos yeux, les étals sont pleins de produits aux couleurs criardes et grossières, la
société de consommation nous avale et nous mâche, transition inéluctable qui donnera
naissance aux nouveaux villages, à ce nouveau présent, à nos vies, la mienne et celles de
mon épouse et de mes deux fils...
Lorsque je crée au pinceau, à la brosse, au couteau qu'importe, toute cette complexe
matière intérieure s'emballe, se mélange et s'agite, entre en effervescence, en ébullition et
trouve son chemin pour sortir de moi comme s'il en allait de ma survie. J'ai choisi l'acrylique
car elle correspond à mon style nerveux et frénétique. Dépositaire d'un trésor, je peins
comme un boulimique, tel un fou cherchant à tout prix à transmettre dans la forme juste et
l'apparence idoine ce qui m'a traversé l'âme. L'acrylique sèche vite, je peux ainsi continuer
à me projeter sur la toile jusqu'à obtenir satisfaction, jusqu'au terme du travail de
l'enfantement. Le format n'a guère d'importance, seules la matière, les formes et les teintes
constituent une vérité pour moi et peuvent rendre Justice à l'intention qui m'habite et
m'anime. J'ai étudié trois années aux Beaux Arts de Mostaganem, à l'autre bout du pays.
C'était la première fois que j'étais seul et si éloigné de mes montagnes, de mon univers clos
et rassurant. Je découvrais des bases et des techniques, la peinture devint une évidence,
une certitude. Une année supplémentaire à peaufiner mes connaissances picturales et
philosophiques, que je n'aurais pas assez d'une vie à explorer. Puis je fus rendu à la société
algérienne comme le réveil sonne le glas d'un doux rêve. Après l'engouement et l'exaltation
des professeurs, j'ai dû m'assumer, assumer mon désir de peindre, mon choix et mon
besoin de peindre, de créer dans un pays à la vie culturelle inexistante en dehors du monde
de la musique et des salons d’arts plastiques que je dirais artificiels des ministères. Il m'a
fallu lutter pour continuer à peindre dans une Algérie encore exsangue après une décennie
de terrorisme aveugle et barbare, aux habitants pressés par des préoccupations vivrières,
écrasés par les aléas de la survie quotidienne ou du strict et récent confort matériel, sans
marché pour l'art, sans public, sans aide ni perspective. Peindre coûte que coûte...
La route ne fut pas moins accidentée que les sentes de nos montagnes. Peindre a un prix,
peindre est un besoin impérieux, une façon de vivre qui s'impose face à d'insurmontables
murs d'incompréhension et d'indifférence.
En 2011, enfin une exposition me permet de montrer mes œuvres, travail sous-terrain,
activité volcanique trop longtemps contrariée : "Psycholor" , tons en temps, lettres ,Suivront
d'autres expositions et installations, ma vie artistique ne peut plus se cacher derrière de
petits boulots si éloignés de mes projections picturales et de mes aspirations à être et
témoigner dans la forme et la couleur.
Je suis de cette jeunesse algérienne innombrable qui inonde la Méditerranée et le monde
en rêvant d'un ailleurs meilleur. J'ai passé l'âge de la sagesse, quarante ans et ce que j'ai à
offrir pour améliorer mon monde, je l'exprime sur mes toiles, je l'offre à la vue, à la
sensibilité et à la réflexion de tous et de chacun, ici en Algérie et ailleurs. On qualifie mon
travail, on dit que je suis un paysagiste abstrait. Je ne discute pas cela, j'évolue,
j'approfondis ma peinture.
Ne voyez là nulle prétention ou arrogance.
Je peins comme je respire et me nourris, c'est ma réalité.
Djamel TALBI

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